L'État anxieux : le poids de la culture stratégique dans la législation antiterroriste américaine (2001-2016)

Clément, Pierre-Alain (2017). « L'État anxieux : le poids de la culture stratégique dans la législation antiterroriste américaine (2001-2016) » Thèse. Montréal (Québec, Canada), Université du Québec à Montréal, Doctorat en science politique.

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Résumé

Pourquoi les États répondent-ils au terrorisme de la manière dont ils le font? La question des causes des modalités prises par cette politique est centrale mais peu traitée dans les rares études sur l'antiterrorisme. Pour l'école réaliste, la différence entre réponses étatiques dépend de l'origine du risque et des capacités de l'État. Pour les théoriciens de la prise de décision, les dirigeants sont contraints par une forte demande de sécurité émanant de l'opinion publique forçant à adopter des mesures coûteuses à l'efficacité incertaines. Pourtant, des pays connaissant un risque à l'origine différente et ayant des capacités variées comme la France et les États-Unis ont mis en place des politiques proches (fort durcissement législatif et opérations militaires extérieures) et la réciproque est vraie pour la France et le Royaume-Uni. De même, les études sur l'opinion face au terrorisme suggèrent une déconnexion partielle entre offre et demande de sécurité. Cette thèse postule l'influence des normes et institutions dans la formation de l'antiterrorisme et pose la question générale : quel est l'impact de la culture stratégique sur l'élaboration des lois antiterroristes américaines depuis le 11 Septembre? Depuis le 11 Septembre, on assiste à un durcissement constant de la législation américaine (Patriot act en 2001 et ses prorogations entre autres) ponctuellement arrêté par une loi partiellement assouplissante (Freedom act en 2015). Cette thèse a une ambition scientifique qui est qualitative, explicative et rationaliste. Elle vise à établir des présomptions de causalité permettant d'expliquer le durcissement continu puis l'assouplissement partiel de la législation américaine en termes de libertés publiques. Théoriquement, cette thèse est ancrée dans l'institutionnaliste historique. On montre qu'il existe deux cultures stratégiques en tension dans les débats du Congrès portant sur l'adoption des lois antiterroristes. L'hypothèse expliquant la résolution de cette tension est la suivante : la culture stratégique du législateur américain favorise, en cas de détection d'une faille de sécurité, l'adoption continue de lois durcissantes et, en cas de détection d'une faille de légitimité majeure, l'adoption d'une loi modérément assouplissante. La méthodologie de reconstruction de processus (process tracing) amène à établir un mécanisme causal repérant les manifestations de cette hypothèse. Le mécanisme est le même pour les deux cultures stratégiques. À partir de l'identification par les élus d'une faille de sécurité / de légitimité, on observe : (1) les partisans du durcissement / de l'assouplissement émettent une injonction à durcir / assouplir la loi; (2) en l'absence de données quantifiées ou chiffrées, ils déplacent le débat sur le terrain paralogique (invocation de référents identitaires, du « bon sens », etc.); et (3) ils promeuvent le principe de coercition / redevabilité. En résulte le durcissement / l'assouplissement de la loi. La méthode est celle de l'analyse manuelle de contenu à l'aide du logiciel Nvivo des débats de trois lois (Patriot act, Patriot sunsets extension act et Freedom act), soit approximativement 219 100 mots, c'est-à-dire environ 377 pages. La thèse montre le rôle structurant des déclencheurs (faille de sécurité / faille de légitimité), qui créent pour les élus un prétexte à agir (sécurité / liberté), qui se traduit par la promotion d'un principe d'action (coercition / redevabilité), action qui remplit une double fonction complémentaire de contrôle et de légitimation de l'action politique. Ainsi, l'évolution de la législation n'est pas un processus ascendant (pression de l'opinion publique irrationnelle sur des dirigeants) mais descendant : les élus sont à l'initiative des changements législatifs, qui sont partiellement en phase avec l'opinion. Dans le modèle parcimonieux et suffisant proposé, la principale motivation du législateur est l'extension irréversible d'une simulation de contrôle légitime par l'application de pouvoirs d'exception. L'apport scientifique de cette thèse est double. D'un point de vue empirique, elle offre une analyse (1) systématique (2) d'un vaste corpus sous-étudié. D'un point de vue théorique, elle (1) démontre que la politique antiterroriste est partiellement découplée de la demande de sécurité et de la recherche de sécurité mais qu'elle (2) répond à l'exigence par l'État d'une extension des moyens de son contrôle d'un environnement perçu comme de plus en plus dangereux, une politique schématisée comme une hystérésis avec effet de cliquet. ______________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : terrorisme, antiterrorisme, sécurité, légitimité, institutionnalisme historique, culture stratégique, reconstruction de processus.

Type: Thèse ou essai doctoral accepté
Informations complémentaires: La thèse a été numérisée telle que transmise par l'auteur.
Directeur de thèse: David, Charles-Philippe
Mots-clés ou Sujets: Terrorisme -- Prévention -- Politique gouvernementale -- États-Unis / Anti-terrorisme -- Droit / Sécurité nationale / Culture stratégique
Unité d'appartenance: Faculté de science politique et de droit > Département de science politique
Déposé par: Service des bibliothèques
Date de dépôt: 06 oct. 2017 13:07
Dernière modification: 06 oct. 2017 13:07
Adresse URL : http://archipel.uqam.ca/id/eprint/10480

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