Approche évolutive appliquée à la valorisation du potentiel en lutte biologique d'un prédateur zoophytophage, la punaise de la molène

Dumont, François (2016). « Approche évolutive appliquée à la valorisation du potentiel en lutte biologique d'un prédateur zoophytophage, la punaise de la molène » Thèse. Montréal (Québec, Canada), Université du Québec à Montréal, Doctorat en biologie.

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Résumé

Les bénéfices qu'engendre la punaise de la molène Campylomma verbasci (Meyer) (Hemiptera : Miridae), une espèce omnivore zoophytophage, lorsqu'elle s'alimente sur des proies (ex. acariens et pucerons) qui ravagent les cultures pomicoles peuvent être compromis par les dommages qu'elle inflige aux fruits. L'exploitation des ressources alimentaires chez les insectes zoophytophages découle d'interactions complexes entre leurs traits morphologiques, physiologiques et comportementaux, et certaines caractéristiques de l'environnement. En théorie, les individus d'une population exploitent les ressources alimentaires et investissent l'énergie et les nutriments de manière différente (ressources allouées à différents traits morphologiques et d'histoire de vie). L'exploitation des ressources alimentaires puis leur allocation à différentes fonctions biologiques par l'organisme sont déterminées, en partie, par le génotype. L'utilisation de ressources aussi différentes, que sont les proies et les plantes, peut entraîner des pressions de sélection antagonistes sur les traits impliqués dans l'omnivorie, et donc désavantager les généralistes comparativement aux spécialistes. Ainsi, selon leurs caractéristiques morphologiques, comportementales, physiologiques ou biodémographiques, différents individus peuvent n'exploiter qu'une fraction des ressources totales disponibles à la population. La spécialisation de la diète serait maintenue dans la population par une hétérogénéité spatiale et temporelle de la disponibilité, de l'abondance et de la qualité des ressources. En pratique, ces différences interindividuelles au niveau de l'exploitation et de l'allocation des ressources se traduiraient par des différences au niveau de l'efficacité dans la lutte aux populations de ravageurs et également au niveau du risque que représentent les punaises de la molène pour la pomiculture. L'objectif principal de ce projet de recherche est de valoriser le potentiel en lutte biologique de la punaise de la molène en appliquant une approche évolutive qui vise l'amélioration génétique des populations. Cet objectif est divisé en sous objectifs qui amènent des connaissances nécessaires à la mise en place d'un programme d'amélioration génétique d'un agent de lutte biologique zoophytophage : 1) établir la base génétique dans la zoophagie (tétranyques et pucerons) et les traits d'histoire de vie (développement larvaire) reliés aux différences dans l'exploitation et l'allocation des ressources chez la punaise de la molène; 2) tester l'hypothèse énonçant que les différences génétiques dans la zoophagie résultent d'une spécialisation pour les ressources animales (i.e. les tétranyques) ou végétales (i.e. le pollen); 3) vérifier l'effet des différences génétiques dans la zoophagie et la spécialisation sur l'occurrence du cannibalisme; 4) finalement d'évaluer en milieu agricole les bénéfices et les risques associés à des lignées montrant une zoophagie élevée ou faible. Ultimement, ces connaissances permettront d'émettre des recommandations sur l'utilisation des punaises de la molène comme agent de lutte biologique dans les vergers de pommiers. Douze lignées isogroupes ont été fondées à partir d'individus capturés sur le terrain à différents moments et sites au Québec. Chaque lignée était initialement composée de deux mâles et deux femelles vierges sélectionnés aléatoirement parmi les individus capturés. Ces lignées ont été maintenues pendant approximativement 15 générations (en assumant une génération tous les 40 jours). Les lignées isogroupes permettent d'augmenter le ratio entre la variabilité génétique inter-lignée (qui devrait être représentative des populations échantillonnées) et la variabilité génétique intralignée (qui devrait être réduite du fait de la dérive génique se produisant au cours du temps). Les tests de zoophagie sur les tétranyques à deux points et sur les pucerons du pêcher (deux ravageurs importants des pommiers), de développement larvaire (Chapitre II) et de choix des ressources ont été réalisés en laboratoire en utilisant les lignées isogroupes (Chapitre III). Puis deux lignées ont été sélectionnées pour leur niveau différent de voracité (un indice de zoophagie) sur les tétranyques à deux points (niveau élevé et niveau bas), puis ont été utilisées pour les tests de cannibalisme (en laboratoire) (Chapitre IV), ainsi que pour les tests en verger (Chapitre V). En premier lieu, les bases génétiques de la zoophagie et l'effet de la disponibilité des ressources animales sur le développement larvaire ont été évaluées. Les lignées isogroupes différaient dans leur niveau de zoophagie sur les tétranyques à deux points (une proie principale) et sur les pucerons (une proie secondaire). En moyenne, le développement larvaire des punaises ne variait pas en fonction de la diète, mais les lignées avaient des temps de développement différents sans égard à la disponibilité des ressources animales. Contrairement à l'hypothèse de départ, les lignées plus zoophages n'avaient pas un développement larvaire prolongé lorsque les ressources animales n'étaient pas disponibles. Les différences de zoophagie entre les lignées suggèrent que deux stratégies pourraient être observées chez les punaises de la molène, ce qui impliquerait un certain niveau de spécialisation soit pour les tétranyques, soit pour le pollen. Ces stratégies correspondraient aux options disponibles pour les punaises en été (sélection des hôtes herbacés avec pollen ou sélection du pommier avec tétranyques). L'hypothèse de spécialisation alimentaire a été testée en mesurant la zoophagie des lignées en présence et en absence de pollen. Le test de choix confirme que certaines lignées de punaises favorisent les ressources animales au dépend des ressources végétales, alors que d'autres lignées réduisent considérablement leur niveau de zoophagie en présence de pollen. La forte héritabilité du choix de ressources en présence de tétranyques et de pollen appuie l'hypothèse que les prédateurs zoophytophages peuvent être plus ou moins spécialisés sur des ressources animales ou végétales. La réponse des individus aux différentes conditions écologiques pourrait varier selon leur spécialisation sur des ressources animales ou végétales. Un lien entre le haut niveau de zoophagie et la spécialisation sur les tétranyques pourrait se refléter aussi dans le niveau de cannibalisme. Cette hypothèse a été testée sur deux lignées sélectionnées pour très forte ou très faible zoophagie. La disponibilité de tétranyques ou de pollen réduisaient le niveau de cannibalisme, mais la lignée hautement zoophage maintenait un niveau de cannibalisme moyen toujours plus élevé que la lignée peu zoophage. Cette lignée peu zoophage, spécialisée sur les ressources végétales, ne diminuait son niveau de cannibalisme (déjà faible) qu'en présence de pollen; la disponibilité des tétranyques n'avait pas d'effet sur son comportement cannibale. Il restait à évaluer in situ si les lignées isogroupes sélectionnées pouvaient produire des bénéfices (contrôle des tétranyques) et/ou des désavantages différents (piqûres aux fruits). Les différences observées en laboratoire se maintenaient dans des tests en verger. Conséquemment, les lignées varient dans les bénéfices qu'elles procurent en verger; la lignée plus zoophage était plus efficace dans la lutte aux tétranyques que la lignée peu zoophage. Cependant, ces deux lignées ne variaient pas leur niveau de risque (quantité de dommages aux fruits) sur le cultivar McIntosh. Seule différence observée : les punaises hautement zoophages engendraient une chute plus importante des pommes que les punaises de la lignée peu zoophage. Ainsi, la punaise de la molène pourrait constituer un agent naturel d'éclaircissement des pommiers. Les différences génétiques observées dans le niveau de zoophagie et dans la spécialisation pour les ressources animales ou végétales chez la punaise de la molène suggèrent que leur potentiel en lutte biologique pourrait être exploité en procédant d'abord par une amélioration génétique (par sélection artificielle des lignées très zoophages et causant peu de dommages) des populations utilisées en verger. Cette méthode a priori pourrait s'appliquer à toutes les espèces de prédateurs zoophytophages déjà identifiés comme agent de lutte biologique dans différents systèmes. ______________________________________________________________________________ MOTS-CLÉS DE L’AUTEUR : Prédateurs zoophytophages, Lutte biologique, Génétique des populations, Miridae, Amélioration génétique, Campylomma verbasci.

Type: Thèse ou essai doctoral accepté
Informations complémentaires: La thèse a été numérisée telle que transmise par l'auteur.
Directeur de thèse: Lucas, Éric
Mots-clés ou Sujets: Punaise de la molène / Miridés / Prédateurs zoophytophages / Agents de lutte biologique / Amélioration génétique / Génétique des populations / Pommier
Unité d'appartenance: Faculté des sciences > Département des sciences biologiques
Déposé par: Service des bibliothèques
Date de dépôt: 27 juill. 2016 15:51
Dernière modification: 27 juill. 2016 15:51
Adresse URL : http://archipel.uqam.ca/id/eprint/8721

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